mardi 20 septembre 2016

"La valse des arbres et du ciel" de Jean Michel Guenassia


J'ai une certaine passion pour les peintres fin XIXème, dans cette peinture vivante où les paysages et personnages sont reconnaissables tout en étant plus dans le ressenti que la vision primitive. La vie de Vincent Van Gogh m'est connue dans les grandes lignes et je ne me suis jamais vraiment posé de question autre que la version officielle. J'ai dévoré de roman qui met en scène ce peintre et une jeune femme enfermée dans sa société.

Résumé

Couverture La valse des arbres et du ciel 
Auvers-sur-Oise, été 1890. Marguerite Gachet est une jeune fille qui étouffe dans le carcan imposé aux femmes de cette fin de siècle. Elle sera le dernier amour de Van Gogh. Leur rencontre va bouleverser définitivement leurs vies.Jean-Michel Guenassia nous révèle une version stupéfiante de ces derniers jours. Et si le docteur Gachet n'avait pas été l'ami fidèle des impressionnistes mais plutôt un opportuniste cupide et vaniteux ? Et si sa fille avait été une personne trop passionnée et trop amoureuse ?




Mon avis

J'ai dévoré ce roman retraçant la vie de Marguerite Gachet, sa vie provinciale, et sa relation avec sa famille notamment  son père, médecin et collectionneur d'art radin.
Portrait of Dr. Gachet.jpg
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki

Marguerite jeune fille de bonne famille idéaliste, oscillant entre femme rebelle et adolescente en crise. On sent à travers ce livre l'ambivalence dans la quête de liberté et la difficulté de tout quitter pour réaliser son rêve. La vie provinciale est bien décrite à mon avis, entre déjeuner mondain et nécessité de garder contact avec la capitale... J'avoue avoir eu une pensée pour Mme Bovary ou Maupassant mais mes souvenirs lointains de ces deux auteurs ne sont peut être pas très réels.

De l'autre coté, nous avons Vincent Van Gogh, peintre en quête de reconnaissance mais bien installé dans son type de peinture, exilé à Auvers sur Oise pour soins médicaux et qui y trouve une certaine inspiration. J'ai aimé lire ses séances de peinture imaginaire et aller jeter un coup d’œil sur les toiles décrites.
Il y a forcément plein de choses de romancées dans cette relation mais j'ai aimé suivre l'évolution de ces 2 personnes si différentes et semblables.
Les personnages secondaires sont assez transparents par ailleurs, que ce soit le frère, le prétendant ou l'amie, assez classiques, ne sont là que pour mettre en lumière Marguerite et Vincent V. Seul le père sort un peu du lot, et dénote par son cynisme et son sens un peu trop exacerbé des conventions sociales.


Vincent van Gogh - The Church in Auvers-sur-Oise, View from the Chevet - Google Art Project.jpg
Source : wikipedia
Le texte est parsemé de notes en italique, reprenant des extraits de journaux notamment. Elles permettent de resituer le contexte historique notamment artistique et politique et apporte une autre lecture à ce roman.
La thèse soulevée par ce livre est intéressante mais je ne sais quoi en penser tant elle diverge de l'histoire "officielle" du peintre.







Au total : Une plongée dans la bourgeoisie provinciale du début XX par le biais d'un des peintres phare de cette époque.

challenge12016br

dimanche 18 septembre 2016

"Manesh" de Stéphane Platteau

Il est de ces livres dont on est sûr qu'ils sont pour nous et qu'ils vont nous enchanter ...
Croisé lors de mes premières imaginales, j'ai été fasciné par l'auteur et l'univers qu'il me décrivait sans oser franchir le cap, c'est finalement grâce au club de lecture que j'ai pris le temps de découvrir ce roman et j'ai adoré !

Résumé


Quelque part dans la nordique forêt du Vyanthryr, les gabarres du capitaine Rana remontent le fleuve vers les sources sacrées où réside le Roi-diseur, l’oracle dont le savoir pourrait inverser le cours de la guerre civile. À bord, une poignée de guerriers prêts à tout pour sauver leur patrie. Mais qui, parmi eux, connaît vraiment le dessein du capitaine ? Même le Barde, son homme de confiance, n’a pas exploré tous les replis de son âme. Et lorsque les bateliers recueillent un moribond qui dérive au fil de l’eau, à des milles et des milles de toute civilisation, de nouvelles questions surgissent. Qui est Le Bâtard ? Que faisait-il dans la forêt ? Est-il un danger potentiel, ou au contraire le formidable allié qui pourrait sauver l’expédition de l’anéantissement pur et simple ?

Mon avis

Je suis rentrée très facilement dans l'univers de ce livre, sur ce fleuve entouré de foret qui m'a fait penser à l'Amazonie.
L'histoire de ce pays et les légendes qui s'y rattachent nous sont distillés peu à peu, notamment à travers le récit de Manesh. On sent rapidement l'importance des astres ce soit coté lunaire ou solaire.

Nous suivons les aventures de Manesh et des Gabarres par la voix de Fintan, à la fois journal de bord et récit mythologique. 
Manesh nous dévoile son histoire, et son épopée nous fait découvrir une partie du royaume, avant la guerre. On y parle religion, croyances anciennes. Son aventure m'a fascinée et je revenais parfois difficilement au temps présent, celui de Fintan, sur les gabarres et à leur remontée sur le fleuve.

Les Gabarres sont un espace clos, qui apportent leur lot de société humaine avec tension et moment de camaraderie. J'ai apprécié découvrir cette vie embarquée et les personnages qui s'y associent. Tous n'auront pas le même rôle ou le même intérêt mais forme un ensemble cohérent. Ces passages de quotidien nous rattache à une certaine réalité. Certaines personnages, notamment féminin gardent pleins de questions en suspens et je serais ravie de découvrir la suite, centrée à priori sur Shakti.

La foret, quant à elle, est un personnage à part entière, magique et mystérieuse, pleine de surprises et de traces du passé qui apparaissent volontairement ou se cachent.

Au total : Un univers dense que l'on apprivoise progressivement grâce aux récits croisés de Fintan et Manesh.

D'autres avis chez Anassete, Blacky qui ont déjà lu la suite et me donne envie de m'y plonger sans trop tarder ! Mais aussi chez Vert,

vendredi 2 septembre 2016

"Un paquebot dans les arbres" de Valentine Goby

Fruit de ma participation au financement de la librairie proche de chez moi (cf le marque page sur la photo), j'ai dévoré ce texte dont les premiers échos sont positifs.

Résumé


Au milieu des années 1950, Mathilde sort à peine de l’enfance quand la tuberculose envoie son père et, plus tard, sa mère au sanatorium d’Aincourt. Cafetiers de La Roche-Guyon, ils ont été le coeur battant de ce village des boucles de la Seine, à une cinquantaine de kilomètres de Paris.
Doué pour le bonheur mais totalement imprévoyant, ce couple aimant est ruiné par les soins tandis que le placement des enfants fait voler la famille en éclats, l’entraînant dans la spirale de la dépossession. En ce début des Trente Glorieuses au nom parfois trompeur, la Sécurité sociale protège presque exclusivement les salariés, et la pénicilline ne fait pas de miracle pour ceux qui par insouciance, méconnaissance ou dénuement tardent à solliciter la médecine.



Mon avis

Un très beau roman qui traite de thèmes que je n'ai pas forcément l'habitude de voir abordés.
 La période historique d'abord, l'après seconde guerre mondiale, l'apparition de la prise en charge sociale et médicale notamment la Sécurité Sociale pour garantir à tous un accès aux soins. Ce roman nous rappelle à quel point il s'agit d'un progrès social et la nécessité de la préserver.
L'évolution de la médecine transparait aussi durant ce récit. Effectivement Paulot et sa famille dont en partie les frais des balbutiements des thérapeutiques, ou des diagnostics. L'acceptation de la tuberculose fait écho à d'autres pathologies actuelles dont la transmission est le plus souvent fantasmée. Soixante ans plus tard, les problématiques ont évolué sur la forme mais pas sur le fond.

Les personnages sont un élément clé du livre.  

Comment ne pas vivre avec Mathilde, ses joies, ses galères, son enfance, sa rage de vivre ? 
Ce personnage est tellement vivant, tellement vrai. J'ai aimé sa détermination, ses faiblesses, sa loyauté envers sa famille.
Il y a tellement d'opposition avec sa sœur Annie, si bien décrite comme de passage, et tellement d'amour avec son frère Jacques. Elle devient malgré elle la pierre angulaire de cette famille éclatée et le subit tout en l'assumant et en maintenant son équilibre.

Mathilde qui s'entoure de personnages auxquels on ne croit pas forcément mais qui ont leur place dans son histoire, dans l'histoire.
Jeanne, adolescente touchante, l’idolâtre, son caractère et ses difficultés en font rarement un personnage clé dans les romans. Antoine, son frère, nous rappelle les dommages des guerres sur les soldats rentrés au pays. Et tous les gens du village, les aidants et les opposants ont leur place dans cette société semi rurale, proche de Paris sans en connaitre les bénéfices.

Enfin, il y a Paulot, solaire dans le début du roman avec le coeur sur la main, qui s'éteint progressivement et devient lunaire. Il reste l'homme autour duquel tourne sa famille tout en étant le point de départ de ses difficultés.

Il existe dans ce roman une critique de la société de cette époque, à travers la reconversion ratée d'Odile et Paulot, ou le peu d'avenir existant une fois entré dans le sanatorium sans parler de l'incompétence de l'assistante sociale ... Certaines scènes dans la mairie ou l'église sont des exemples de la lâcheté humaine et de notre difficulté à lâcher nos acquis sociaux et à tendre la main aux plus démunis.

Tout ceci est porté par l'écriture magnifique de Valentine Goby, qui m'avait peu touchée dans KinderZimmer, alors que le sujet était tout aussi fort, avec déjà des femmes au premier plan.
 Dans ce roman, elle se révèle vraie dans les moments pleins d'émotion sans larmoiement inutile. Elle relate sa rencontre avec la femme qui a inspiré ce roman pleine de douceur, et juste évoquée à certains moments pour nous remettre dans cette opposition actuelle/passé pas si lointain.

Au total : Un excellent moment de lecture, que je ne peux que recommander.


challenge12016br